Nous avons traduit en français ce texte, tiré d’une relation écrite il y a plus de deux ans pour un meeting anticarcéral, afin de mieux faire connaître le régime (avec sonhistoire) dans lequel se trouve Alfredo Cospito depuis le mois de mai. On comprendra ainsi la portée de son combat et le choix – aussi intelligent que généreux – d’ajouter à sa revendication de sortir du 41 bis la question de l’ergastolo ostativo (institut juridique qui subordonne toute remise d’une peine sans fin à la collaboration avec les magistrats).
Le régime carcéral de 41 bis
Le régime de 41 bis est une suspension des règles de traitement à l’égard des détenus et des internés pour des crimes considérés particulièrement graves (de « terrorisme »ou de subversion de l’ordre démocratique), ou pour des crimes d’association de type mafieux ou d’association de malfaiteurs avec des buts spécifiques à propos desquels on a des éléments qui laisseraient croire que des liens existent encore entre le détenu et les « organisations criminelles », « terroristes » ou « subversives ». Cette suspension implique les restrictions nécessaires à garantir les exigences d’ordre et de sécurité et à empêcher les contacts avec les dites organisations. Les détenus qu’y sont soumis doivent être accueillis dans des établissements qui leur sont consacrés de manière exclusive ou bien dans des quartiers spéciaux et séparés du point de vue logistique du reste de l’établissement.
Le régime de 41bis fût introduit en 1992 après l’attentat de Capaci*. La disposition avait été déjà introduite par la loi Gozzini (loi 633/86), qui avait modifié la loi 354/75 sur le système pénitentiaire. À ce moment-là ce régime pouvait être appliqué seulement dans le cas d’urgence internes aux prisons : « En cas exceptionnels de révolte ou dans autres situations d’émergence, le Ministre de la Justice a le pouvoir de suspendre complètement ou partiellement l’application des règles normales de traitement des détenus et des internés. La suspension doit être motivée par la nécessité de rétablir l’ordre et la sécurité et sa durée est celle strictement nécessaire à atteindre le but susdit ». À ce temps-là, ce régime pouvait donc intéresser seulement un établissement entier ou une partie d’un établissement, pas les prisonniers individuellement.
Après le massacre de Capaci, le décret-loi du 8 juin 1992 n. 306 ajouta un deuxième alinéa, qui fut après transformé en loi, 7 août 1992, n. 356. Le Ministre de la Justice pouvait, en présence de « motivations graves d’ordre et de sécurité publiques », suspendre les garanties et les règles de la loi pénitentiaire pour appliquer « les restrictions nécessaires » aussi à l’encontre des détenus pour mafia individuellement,avec le but d’empêcher le passage d’ordres et de communications parmi les criminels en prison et leurs organisations sur le territoire.
La référence normative à celle qui est connue comme « prison dure » est au deuxième alinéa de l’article 41 bis de la loi pénitentiaire, introduit par l’article 19 du décret-loi306/92. Au départ elle était une disposition temporaire, renouvelée tous les ans, mais en 2002, après l’attentat à Marco Biagi**, elle devint définitive et fût étendue aux condamnés pour « terrorisme et éversion ». À ce temps-là, l’application du régime ne pouvait pas être inférieur à un an et ne pouvait pas dépasser les deux ans, avec des prorogations successives de un an. Depuis 2009, avec un nouveau changement, il peut désormais durer 4 ans et il peut être prorogé pour des périodes successives de deux ans. Avec la même loi, on a établi que les sections de 41 bis doivent se trouver de préférence sur une île, même si en pratique il n’y a aucune section de 41 bis en Sicile.
Sujets intéressés
La prison dure peut être appliquée même aux simples inculpés, c’est-à-dire aux personnes contre lesquelles aucun procès n’est commencé : des simples suspects. Même si en Italie il y a la présomption d’innocence, la Cour Constitutionnelle a affirmé que le 41 bis n’a pas la fonction d’anticiper la peine, mais bien de« précaution par rapport à des dangers actuels pour l’ordre et la sécurité, liés concrètement à la détention de certains condamnés ou accusés pour délits de criminalité organisée ».
A origine le 41 bis était réservé aux membres des organisations mafieuses, mais aujourd’hui la liste des crimes est bien plus longue et hétérogène :
Délit d’association de malfaiteurs du type mafieux.
Délits commis en profitant des conditions prévues par l’association mafieuse ou avec le but de faciliter l’activité des association mafieuses.
Délits commis avec finalité de terrorisme, même international, ou d’éversion de l’ordre démocratique par le biais d’accomplissement d’actes de violence.
Délit de réduction ou maintien en esclavage ou en servage. Prostitution de mineurs.
Délit de celui qui, en utilisant des mineurs, réalise des exhibitions pornographiques ou produit du matériel pornographique ou pousse de mineurs à participer à desexhibitions pornographiques et celui qui vend le susdit matériel pornographique.
Délit de traite d’êtres humains.
Délit d’achat ou vente d’esclaves.
Délit de violence sexuelle de groupe.
Délit de séquestration de personne au but de vol ou d’extorsion
Délit d’association de malfaiteurs au but de contrebande de tabacs travaillés àl’étranger.
Délit d’association au but du trafic de substances stupéfiantes ou psychotropes.
Il faut souligner comme la référence aux délits commis « en profitant des conditions ou avec le but de faciliter l’association du type mafieux » étend de façonindéterminée le nombres des personnes qui pourraient etre soumis à la prison dure.Juste un exemple : un prolétaire de la périphérie de Naples qui est suspecté d’avoir commis un vol ou d’avoir vendu de la drogue pourrait finir en 41 bis car ces crimes pourraient avoir été commis pour « faciliter » la Camorra. De fait, le 41 bis intéressedes entières catégories sociales d’individus, indiqués en bloc comme ennemis, qui sont pour la plupart les prolétaires du Sud d’Italie.
Application
La décision d’appliquer le régime de la prison dure à une personne est prise par le Ministre de Justice, qui, depuis la loi n. 279/2002, doit aussi évaluer la dangerosité du sujet « en concret », c’est-à-dire que le conditions standard de détention ne sont pas en mesure de couper les contacts avec « l’association criminelle d’appartenance ». La décision ministérielle est liée à l’avis du parquet qui est chargé de l’enquête ou du procès, les infos fournies par la Direction Nationale Anti-mafia et Anti-terrorisme (D.N.A.A.) et par les organes centraux de police qui sont spécialisés dans le contraste à ce type spécifique d’organisation criminelle. Ces infos ne sont pas déposées, donc l’avocat de la personne intéressée ne peut pas le connaître et pourra déposer des éléments en faveur sans savoir quelles sont ceux à sa charge. Ceci est une claire violation des droits à la défense et au contradictoire, prévus par la Constitution italienne.
La mesure, qui a une durée de quatre ans, peut être prorogée de deux ans en deux ans,après une évaluation de la réitération, du profil criminel, de la position du sujet dans l’organisation, de la perdurante activité du groupe, de la survenance de nouvelles incriminations, des résultats du traitement pénitentiaire et du train de vie des membres de la famille. La loi ne prévoit aucun limite maximal à la durée de ce régime et le législateur a explicité que « le simple cours du temps ne constitue, en soi,élément suffisant pour exclure la capacité de maintenir les contacts avec l’association ou pour démontrer la fin de son caractère opérationnel ». À titre d’exemple, les trois révolutionnaires communistes qui sont en régime de 41 bis depuis 2005, même si il n’y a eu aucune autre action des Nouvelles Brigades Rouges depuis leur arrestation, y doivent rester car le « terrorisme politique » est un « phénomène karstique ». Du fait,la seule façon de sortir de ce régime est de collaborer avec l’État, sauf dans le cas où l’association de référence soit considérée terminée. Le détenus peut sortir de ce régime seulement en faisant les noms d’autres membres du groupe et en déclarant qui n’en fait plus partie et qu’il ne se reconnaît plus dans ce groupe.
Déroulement de la vie quotidienne
Les sections de 41 bis sont surveillées par le Groupe Opératif Mobile (G.O.M.), qui est une subdivision spécialisée de la Police Pénitentiaire instituée en 1997 et qui est directement aux ordres du chef du D.A.P. (Département de l’Administration Pénitentiaire). Les devoirs du G.O.M., qui ne peuvent avoir aucun contact avec des autres gardiens de prison, sont :
– garde et contrôle des détenus qui sont considérés très dangereux ou qui sont en régime de 41 bis, ou des certains collaborateurs de justice
– gestion de situations à haut risque opératif dans les prisons, pour le rétablissement de l’ordre et de la sécurité en cas de émeutes et dans des situations d’ordre public encollaboration avec d’autres forces de l’ordre
– escorter les magistrats menacés par la criminalité organisée
Le G.O.M. révéla tout de suite sa nature et son véritable rôle. En novembre 1998, des agents du G.O.M. entraient dans la prison de Opera (Milan) pour chercher des portables et pour mieux les chercher obligeaient une centaine de détenus à se dénuder et à rester pour plus de quatre heures dehors, au froid dans la cour, tant que les geôliers détruisaient tout ce qui était dans les cellules. Dans les prisons de Parma, Secondigliano (Naples) et Pavia ils rouaient les détenus d’une façon insensée, mais ils sont connus à la renomée internationale depuis le G8 de Gênes, pour les tabassages, les viols et les tortures dans la caserne de Bolzaneto.
En octobre 2017, le D.A.P. envoya une circulaire aux Inspecteurs Régionaux de l’administration pénitentiaire et aux directeurs des prisons pour « homogénéiser l’application du régimes du 41 bis entre les différents prisons ». La cellule,individuelle, est très petite, elle doit avoir seulement un lit, une table, un armoire,une chaise ou un tabouret, miroir en Plexiglas et télévision fixée au mur. Les casseroles ne peuvent être plus de deux, avec des dimensions préétablies et il n’est pas possible de recevoir de l’extérieur des aliments qui doivent être cuisinés, la limite des dépenses est de 500 euro par mois et 150 euro par semaine, on ne peut pas recevoir plus de 350 euro par mois depuis l’extérieur, les jeux de cartes doivent être rigoureusement contrôlés, les chaussures qui pourraient cacher des objets ne sont pas admises, les photos à afficher et les objets sont réglementés, pas de produits spray,seulement de fournitures en plastique pour la toilette, il n’est pas possible d’avoir plus de 4 livres en cellule, qui ne peuvent être envoyés depuis l’extérieur et qui doivent, de conséquence, provenir de la bibliothèque de la prison, la télévision ne peut transmettre que des chaînes nationales et il n’est pas possible de lire des journaux locales de la zone de provenance. En 2019, suite à des battage de protestation durées un mois dans la section masculine du 41 bis de L’Aquila, l’interdiction de cuisiner encellule et l’interdiction d’allumer la télévision de 24 heures à 7 heures du matin ont étés suspendues.
Les fenêtres sont pour la plus part en hauteur, elles ont de deux à trois niveau de vitres,plus les barreaux. De plus, il n’est pas possible d’accéder aux espaces communs de la prison et l’isolement est quasiment complet : il n’est pas possible de communiquer avec les autres détenus, même pas donner le bonjour, sauf les trois avec lesquels on a la socialité, qui sont décidé par la direction de la prison et qui peuvent être changés à tout moment, ce qui se passe souvent dès que des rapports plus profonds s’instaurent,et qui ne peuvent rencontrer que pendant les deux heures d’air par jour. S’il y a une cour, dans la plus part de cas elle est très petite, avec des murs qui ne permettent pas de voir à l’extérieur et une grille métallique au-dessus. Il n’est pas possible de rencontrer des Garants des Droits des Détenus sauf celui national et il n’est pas possible de s’inscrire à des association ou à des partis, ni de participer à des délégations des détenus. Il est possible de rencontrer les membres de la famille une seule heure par mois dans des cabines séparés par un vitre (sauf dans le cas où il y ait un enfant de 12 ans) qui ont parfois les dimension d’un mètre pour un mètre et avec l’enregistrement audio et video de l’entretien. Il n’est pas possible de téléphoner, sauf si le membres de la famille ne viennent pas au colloque mensuel et le directeur de la prison l’autorise. Seul dans ce cas il est possible un appel par mois de la durée de dix minutes, qui doit être fait depuis la prison la plus proche du lieux de résidence du membre de la famille. Jusqu’au 2013 les entretiens avec les avocats, aussi, étaient limités. La poste est toujours censurée et les détenus sont surveillés 24 heures sur 24.
Limitations supplementaires
Dans de cas particuliers, les détenus peuvent aussi être soumis à l’isolement diurne, ce qui signifie l’isolement complet.De plus, il y a les A.R. (Aires Réservées), dans la plus part des cas dans des locaux souterrains, avec une seule heure de socialité par jour avec un autre détenu, qui sont utilisées pour la détention de boss mafieux considérés les plus dangereux. Étant donné que ils ne peuvent se rencontrer parmi eux, ce qui se passe est qu’un autre détenu, qui est dans un régime « normale » de 41 bis, doit être placé dans l’A.R. avec le boss et il est donc soumis à ces ultérieures restrictions. Il y a des cas de détenus qui sont sortis de ces structures avec la peau verte, car ils n’ont pas été exposés à la lumière du soleil pendant des années. Les A.R. n’ont aucun fondement normatif, elles sont instituées par des actes administratifs basés sur une interprétation extensive de l’art. 32 du règlement d’exécution du système pénitentiaire.
Vidéo-conference
Le procès en vidéo-conference ou « a distance » fut introduit avec la loi n. 11/1998,qui prévoit cette système de participation aux audiences s’il y a des raisons graves de sécurité et d’ordre public, si les débats sont particulièrement complexes et la participation à distance est nécessaire pour éviter de retards, si le détenu se trouve en régime de 41 bis ou – depuis 2001 – en cas de crimes de terrorisme. Cette forme, qui réduit fortement le droit à la défense, est devenue de plus en plus commune, et depuis le Covid a intéressé des milliers de détenus. Depuis 2017, avec la réforme Orlando, la vidéo-conference est devenue la modalité « normale » pour les procès pour criminalité organisée, pour les crimes les plus graves commis avec finalité de terrorisme ou d’éversion de l’ordre démocratique ou encore pour le crime d’association subversive. De plus, le juge ne doit plus faire une disposition motivée pour la prévoir, mais il suffit que il le communique aux autorités compétentes et aux parties. Elle est utilisée même quand le détenu doit témoigner dans d’autres procès.
Prisons avec des sections de 41 bis
Cuneo, Via Roncata, 75 – 12100 Cuneo
Opera, via Camporgnago, 40 – 20090 Opera, Milano
Parma, via Burla, 59 – 43100 Parma
L’Aquila, via Amiternina, 3 località Costarelle di Preturo – 67100 L’Aquila
Napoli Secondigliano, via Roma verso Scampia, 350 – 80144 Napoli
Novara, via Sforzesca, 49 – 28100 Novara
Roma Rebibbia, via Raffaele Majetti, 70 – 00156 Roma
Sassari, strada Provinciale 56 località Bancali – 07100 Sassari
Spoleto, via Maiano, 10 – 06049 Spoleto,
PerugiaTerni, via delle Campore, 32 – 05100 Terni
Tolmezzo, via Paluzza, 77 – 33028 Tolmezzo, Udine
Viterbo, strada S. Salvatore, 14/b – 01100 Viterbo
Il y a aussi trois nouvelles sections qui sont en train d’être construites en Sardaigne.
* En 1986, à Palermo, commença le soi-disant “maxi-procès” contre la mafia, où 474
personnes étaient inculpées. En 1992 les juges Falcone et Borsellino parvenaient à être
chargés des procédures d’appel et leur jugement frappa durement la mafia. Le 23 mai 1992
une partie de l’autoroute A29, près de Capaci (Palermo), explosait quand les voitures de
Falcone et de son escorte étaient en train de passer. Quelques mois après Borsellino aussi
fût tué par une explosion. Parmi les deux explosion on compte 11 morts
**En 2002 Marco Biagi, comme Massimo D’Antona en 1999, fût tué par les Nouvelles Brigades
Rouges. Ils étaient des professeurs de droit qui avaient collaborés avec plusieurs
gouvernements italiens dans la réforme de la loi du travail, en introduisant les contrats
précaires.
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