Communiqué #2 : Sabotage d’un pylône THT en France/Grand-Est

En décembre 2022, en solidarité avec le prisonnier gréviste de la faim Alfredo Cospito, nous avons saboté un pylône THT et partiellement retiré son boulonnage (https://lille.indymedia.org/spip.php?article35371&lang=fr). Le sabotage d’une ligne à haute tension n’est pas sans danger et, même s’il est effectué sans erreur, il reste toujours un certain risque. Nous avons cependant jugé ce risque acceptable et l’action distrayante. Comme l’action directe est toujours une tentative de motiver et d’inspirer d’autres contextes, nous avions déjà annoncé notre intention de donner quelques conseils techniques :

Choix de la cible : Lors du choix du mât, veillez à ce que les isolateurs (les bobines de céramique auxquelles sont accrochés les câbles) soient verticaux ! Une position diagonale ou horizontale témoigne d’une charge de traction dans la direction correspondante. Choisissez l’endroit le plus isolé possible. Veillez à ce qu’il n’y ait pas de personnes entre l’objet et les pylônes les plus proches (p. ex. des routes fréquentées croisent la ligne). Choisissez votre chemin de fuite de manière à ce qu’il ne puisse pas être bloqué par la chute de la ligne.

Évaluation / réduction des risques : Il arrive régulièrement (bien que rarement) que des pylônes électriques se plient ou tombent, même sans sabotage. Cela peut se produire par exemple en raison d’une tempête, du poids de la neige, ou simplement de la fatigue des matériaux ou d’un entretien insuffisant. Il en résulte un risque de basculement prématuré du mât. Ce risque augmente avec chaque vis desserrée et de manière exponentielle avec chaque pied complètement dévissé. C’est à vous, en tant que groupe, de décider jusqu’où vous voulez aller. Dans tous les cas, planifiez l’action en tenant compte de la possibilité que le mât tombe pendant que vous êtes encore sur place. Tant au pied du mât qu’à l’endroit où les câbles touchent le sol, il se produit dans un certain périmètre une tension au sol qui est potentiellement mortelle ! Éloignez-vous de l’objet aussi vite que possible dans le sens inverse de la chute. Veillez à ce que votre corps reste en contact avec le sol à tout moment (mise à la terre), en marchant à petits pas « traînants ». Veillez à ce que les conditions météorologiques soient favorables. N’effectuez en aucun cas cette action en cas de vent fort, de forte pluie ou de chute de neige !

Comment procéder : Lors de la reconnaissance de l’objet, nous avons constaté avec un certain agacement que les saillies de filetage de chaque vis étaient détruites par des perçages (photo). Une mesure anti-sabotage de RTE dont nous ne savons pas si elle s’applique à toutes les lignes THT ou seulement à celle-ci. Rétrospectivement, nous pouvons constater que c’est certes plus fatigant, mais que c’est quand même possible. Pour les vis, nous nous sommes concentré.e.s sur celles qui relient le mât à ses fondations (clé de 50). Côté intérieur, une poignée courte d’environ 20-30 cm suffit, car elle se coince dans la structure du pied. Côté extérieur, vous aurez besoin d’une extension de tube solide pour augmenter l’effet de levier. Pour faciliter le transport, il est recommandé d’utiliser plusieurs tubes qui s’emboîtent les uns dans les autres. Pour certaines vis, nous avons eu besoin d’un levier allant jusqu’à 2 mètres. Avant l’action proprement dite, nous avons vaporisé les vis avec de l’huile pénétrante (WD 40) et l’avons laissée agir plusieurs heures. Nous avons répété cette opération au début du dévissage. Les dernières vis étaient nettement plus difficiles à retirer, ce que nous avons interprété comme un signe que le mât commençait déjà à s’abaisser. Pour cette action, vous aurez besoin d’au moins 2 à 3 personnes sur l’objet. Vous pouvez compter sur une durée d’environ 3 heures par pied (16 vis à la fois). Si vous trouvez un mât dont les boulons n’ont pas été endommagés, cela ira probablement plus vite.

Traces : Il est presque impossible de travailler plusieurs heures au même endroit sans laisser beaucoup de traces ! Contrôlez régulièrement pendant le travail si votre corps est encore entièrement recouvert (par ex. entre la manche et le gant). Débarrassez-vous en tout cas de vos vêtements et de vos chaussures après l’action. Gardez votre lieu de travail propre et stockez vos outils de manière à ne rien laisser derrière vous par inadvertance, même si vous devez interrompre l’action avant la fin.

Alternatives : depuis notre intervention, d’autres actions de sabotage de lignes à haute tension ont eu lieu en France. A Salindres (Gard), un pylône dont la ligne alimente une usine chimique d’ARKEMA a été scié le 21.12.2022 (https://sansnom.noblogs.org/archives/14865) et à Vitrolles (Bouches du Rhône), quelques jours plus tard, deux incendies sous une ligne THT ont provoqué des coupures de courant à l’aéroport de Marseille-Provence et chez AIRBUS Helicopters. (https://sansnom.noblogs.org/archives/14890).

« Ces incendiaires ont par ailleurs mis fin à la rumeur selon laquelle un poteau électrique en feu, c’est beau, mais ça ne coupe pas l’électricité ! » peut-on lire dans un résumé publié sur nantes.indymedia (https://nantes.indymedia.org/posts/81876/et-tombent-tombent-les-pylones/) de l’action, pour laquelle il n’existe à notre connaissance aucune lettre de revendication*. Nous souhaitons nous y attarder un peu : Selon nous, il y a fondamentalement deux méthodes différentes pour saboter efficacement une ligne THT par le feu. La première consiste à attaquer le mât lui-même par le feu. Pour cela, la structure métallique doit être chauffée à plus de 1200° C pendant un certain temps. Un feu normal ne suffit pas ! Pour endommager l’acier dans sa substance, il faut le porter à incandescence, comme c’est le cas lors du forgeage à l’aide de charbon de bois et d’un énorme apport d’oxygène. Une fois chauffé de cette manière, la stabilité de l’acier reste compromise même après son refroidissement. C’est ce qui s’est passé par exemple lors d’un sabotage THT dans le sud de la Meuse en 2017. Pour liquéfier le métal et faire ainsi s’effondrer le pylône, il faut une température d’environ 5000° C comme ce serait le cas par exemple avec l’utilisation de thermite. L’autre méthode, qui a probablement été utilisée dans le cas actuel, consiste à générer une flamme extrêmement élevée, qui va du sol jusqu’aux câbles. Le feu a la propriété de conduire l’électricité et peut ainsi provoquer un court-circuit. Il s’ensuit une coupure de courant immédiate, mais les dommages causés à la structure sont relativement faibles.

Nous avons été particulièrement satisfait.e.s de la description détaillée de l’action à Salindres (Gard), jointe à la déclaration. Même si cette méthode a déjà été utilisée avec succès des centaines de fois depuis les années 1970, nous avons opté pour une autre méthode pour des raisons de sécurité. En d’autres termes, nous n’avons tout simplement pas osé abattre le mât ! Nous sommes tout à fait conscient.e.s que la déclaration que nous avons publiée rapidement augmente le risque que le dommage soit découvert et réparé à temps par RTE. Cependant, la priorité de notre intervention était – dans ce cas – de soutenir la lutte de notre camarade Alfredo, ce qui nécessitait une communication publique.

Rage,
Transmissions et
Emeutes

Service des Déconnexions de Pylones en tout genre.

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